CARNET DE RESIDENCE 3#
3 avril 2017, Londres
10 mois après j'ai réussi à retrouver mes amis Ammar, Waseem, Ahmad, Mohamed, Fady, Ammar...
Nous nous sommes rencontrés dans le campement de Calais dans des conditions difficiles.
Ils ont essayé de traverser la frontière pendant 10-11 mois et finalement ils sont arrivés au Royaume-Uni.
La plupart d’entre eux sont maintenant à Londres. Après une longue attente, ils ont reçu leurs papiers et certains ont réussi à faire venir leurs femmes et leurs enfants.Maintenant commence un processus d’adaptation difficile. Il faut chercher du travail et parler la langue anglaise.
C’était émouvant de les retrouver en forme et pleins d’espoir. Ils m’ont raconté leur passage de la frontière et leurs premiers jours au Royaume-Uni, une attente éternelle des documents, de leur premier travail et de l’arrivée de leurs familles.
Un jour nous avons visité le British Museum où les images de leurs ancêtres remplissaient les salles. L’art assyrien de 5000 à 2000 av. J.-C. C’est paradoxal de retrouver leur propre histoire sur un territoire lointain dans lequel ils sont arrivés d’une manière illégale.
Aujourd’hui face à l’art qui appartient au son passé je ressens leur étonnement, l'orgueil d'être en face d'une œuvre de beauté exceptionnelle alors que la rage de voir son passé déplacé/volé vers un autre territoire/nation.
En observant les magnifiques bas-reliefs, je me demande qui représente le lion blessé dans cette histoire d' immigration, et comme tous ses cicatrices guérissaient. Comme dit Laurent Gaudé dans son livre El Dorado: "Aucune frontière ne vous laisse passer sereinement. Elles blessent toutes"